Le concept de « cosmopolitiques » tel qu'il est proposé par Isabelle Stengers, et dans sa foulée par Bruno Latour et d'autres, se démarque expressément du cosmopolitisme Kantien. Dans le cosmopolitisme Kantien, le moment d'une « paix perpétuelle » se trouve dans la reconnaissance par tous d'un jus cosmopoliticum universel et transcendantal. Dans notre commune humanité, il y aurait une garantie d'homogénéité et d'unité, et donc, un dénominateur commun à tous les humains (comme par ex. la rationalité, la communication ou la nature) duquel devrait émerger cette paix perpétuelle avec ses règles universelles, dans lesquelles tous et toutes se reconnaîtront et ne pourront que se reconnaître. Ce genre de cosmopolitisme lié à la modernité est bien connu dans le monde des juristes : il est visiblement à l'oeuvre dans certaines approches universalistes par exemple du droit comparé, du droit international et des droits de l'homme. Il y est, il faut le dire, à chaque fois également fort contesté. Les questions posées ici sont de savoir si ces contestations du cosmopolitisme juridique, ainsi la pratique du droit elle-même, ont aujourd'hui une dimension cosmopolitique – mais au sens, cette fois, d’Isabelle Stengers